Nous sommes en août 2012, aux Jeux Olympiques Gabrielle Douglas retient l’attention de tous ceux présents au Mean Fiddler, un bar irlandais qui borde le quartier communément appelé Hell’s Kitchen. L’été est chaud, ça met tout le monde de bonne humeur, New York est magnifique! Mais commençons par le commencement…
Les frangines, encore elles, ne s’étaient pas vues depuis deux ans, des retrouvailles ambitieuses. Le départ n’était pas sans complications, car le week-end où les juillettistes et les aoûtiens se croisent à l’aéroport Charles de Gaulle, est certainement le plus chargé de l’année! Tous les vols sont retardés d’un quart d’heure, les resquilleurs se multiplient à vue d’œil, ça se bouscule, tout le monde est anxieux… Je joue des coudes et du moment où je pose le pied dans l’avion, jusqu’au moment où je m’assieds, les passagers me fusillent du regard… Qui plus est, je passe pour une emmerdeuse parce que nous jacassons comme deux pies pendant un bon moment… Deux ans c’est long.
Huit heures, 5 000 km, et une paire d’oreilles bouchées plus tard, nous arrivons à choper un taxi (noir et pas jaune à mon grand désespoir) au JFK. Il nous dépose devant l’hôtel Edison, un édifice au décor suranné sur la 47e rue. Je suis épuisée, avec 20 heures d’avion dans les pattes et des heures d’aéroport; le temps d’une toilette bien méritée, nous nous aventurons dans la ville pour trouver un vendeur de hot dogs, et un pub pour quelques pintes de bière.
‘Tôt’ le lendemain, nous allons en repérage, marchant de Time Square où nous petit-déjeunons, jusqu’à l’entrée sud-ouest de Central Park, nous arrêtant crevées pour manger des hot dogs (encore) et avaler des sodas, puis traversant le parc jusqu’au Metropolitan museum, qui donne sur la très célèbre 5e avenue… L’ensemble de la balade se révèle agréable, Time Square n’est pas carré!!! Mais très lumineux (comme à la télé!) et le monde qui y grouille est intéressant, bariolé, bruyant, je donne immédiatement un nouveau sens à l’expression ‘liesse populaire’. Les marches immenses où Alicia Keys et Jay Z ont tourné leur clip ‘Empire state of mind’ trônent face à la boule géante qui tombe à minuit lors du réveillon du nouvel an. Punaise, d’entrée de jeu, j’ai l’impression de déambuler dans un long métrage… Si Matt Bomer déboulait au coin de la rue, ça ne m’étonnerait pas plus que ça! Je me surprends à calculer la probabilité de tomber sur une équipe de tournage. Nos premiers contacts avec les New-Yorkais se révèlent amusants, ils sont adorables, nous mêlent à leur conversations, nous prennent à témoin, donnent de doux noms à tout le monde, ainsi je suis passée de Darling à Lovely en moins d’une heure, ça fait tellement de bien de se sentir accueillie, ça change de certains pays que je ne nommerai pas…
J’apprends que la population de Central Park, aussi connu sous le nom d’écureuils, se compte en milliers, qu’on y trouve 27 ponts, et sept bassins, un zoo sans compter les centaines de bancs, les artistes de passage, les sculptures dont ma préférée est Alice au Pays des Merveilles! A côté du champignon géant, un musicien joue ‘Moon River‘, nous faisons une pause pour savourer un instant où la nostalgie d’un temps que nous n’avons pas connu nous prend! Nous croisons des enfants en sortie scolaire ou peut être est-ce une fête d’anniversaire, ils ont tous un ballon gonflé à l’hélium noué au poignet, trop chou! Un homme, qui a visiblement fugué du bureau, tente de prendre un peu de soleil sur la pelouse, il a tombé la veste, les manches retroussées et les orteils en éventail; nous croisons aussi des joggeurs, un yogi, des nounous avec poussette et aussi des lecteurs de journaux affalés sur les bancs. Pour rigoler je récupère un New York Times abandonné sur l’un d’eux!
Épuisées, c’est avec bonheur que nous nous arrêtons au Metropolitan Museum. La foule y est aussi dense qu’à Time Square, ça se bouscule un peu au comptoir des tickets où nous nous fendons de 25$ chacune pour l’entrée! Je découvre des artistes dont je ne soupçonnais pas l’existence mais aussi ceux que j’admire depuis que je suis en âge d’ouvrir un dictionnaire! La bonne surprise est de croiser une peinture qui me fait penser à Paul et Virginie, je suis convaincue qu’il s’agit bien des tourtereaux, car comme décrit dans le livre, ils s’abritent de la pluie sous la jupe de Mademoiselle de la Tour…
Depuis quelques heures déjà, je me suis fait mal au pied, et quand nous reprenons notre expédition sur la 5e Avenue, j’accueille avec joie chaque arrêt, chaque banc, chaque magasin qui permet une pause! De plus j’ai une inflammation qui torture mon épaule comme chaque fois que je voyage sans sac à dos! Une vraie pause s’impose! Afin de m’épargner une longue marche pour dîner et ‘casser une pause’, nous explorons les environs de l’hôtel… C’est ainsi que nous découvrons le Mean Fiddler !
Le pub nous plaît immédiatement, nous y installons nos quartiers chaque soir, au point où je m’arrange pour faire ami-ami avec Dean et Brother Black, les videurs, histoire de ne pas avoir à sortir mon passeport à chaque fois que nous nous y pointons! Ils vérifient chaque entrée, le principal critère étant d’avoir la majorité qui est de 21 ans aux Etats-Unis, car il est interdit de vendre de l’alcool à des mineurs, mais les resquilleurs sont futés et ça donne lieu à des situations plus que cocasses! En journée de nombreux pubs font restaurants… Et les mineurs sont évidemment autorisés aux restos! Sauf que voilà, une fois qu’ils y sont, ils y restent; du coup quand on se pointe au pub après le dîner , les gosses sont déjà grave déchirés! Les videurs ont fort à faire, à la table de beer pong le taux de grossièreté crève le plafond, on asperge même ses adversaires ou ses coéquipiers de temps à autre, des demoiselles sont régulièrement virées du comptoir du bar, vêtues trop court, elle n’ont plus grand chose à cacher. Aux toilettes, le spectacle atteint son paroxysme! Vous savez comme moi que les toilettes publiques sont tout sauf des quartiers où l’on veut s’installer… Et pourtant… Deux donzelles sont assises par terre, la première visiblement au bord du coma éthylique recroquevillée sur les genoux de l’autre, elle même loin d’être fraîche, pendant qu’une troisième à l’air de bloquer l’entrée à une des deux cabines, appuyée à l’encadrement! Je comprends au bla-bla de cette dernière qu’elles ont réquisitionné une partie des chiottes pour leur usage perso, au moins celle-là est encore en mesure de marcher et de parler! Jamais je ne me suis soulagée aussi vite de ma vie! Le barman adorable et beau gosse malgré sa cicatrice au visage ne cesse de secouer la tête de gauche à droite! Je me dis que c’est une bénédiction d’avoir autant de taxis dans les rues, ça doit éviter bien des accidents…
Avec ma patte folle, nous décidons de nous mouvoir en bus pour touristes. Ce n’est pas si mal, et moi j’aime assez être en hauteur, la perspective est différente et au verso du ticket long comme le bras, nous récupérons quantités de remises et d’entrées gratuites et nous en profitons! Remises sur l’entrée à l’Empire State Building, sur le ferry qui nous emmène à la Statue de la Liberté, entrée gratuite au Musée sur la ville de New York, ainsi de suite… C’est grâce aux comiques qui animent la route que nous découvrons Union Park et son animation débridée, l’hôpital sans coin (parce qu’autrefois on pensait que les microbes vivaient dans les coins), le musée qui a servi de décor au film La Nuit au Musée, mais aussi le Dakota Building où Chapman a assassiné John Lennon… « So spooky » commente l’animateur…
Parmi les incontournables de New York, je mets en bonne position le Washington Square Park. C’est moins grandiose que le Central Park, mais beaucoup plus vivant! Nous y croisons un homme couvert de pigeons et je me demande comment on en vient à devenir pigeonman? Ça doit être un super-pouvoir-sous-estimé! Des jeunes se rafraîchissent à la fontaine en face de l’arche en marbre où Meg Ryan dépose Billy Crystal quand ils arrivent à New York dans When Harry met Sally, des joueurs d’échecs s’affrontent en rang avec pour enjeu un malheureux dollar, l’un d’eux m’invite à me faire plumer et je lui réponds que si ça ne le dérange pas, je préfère le prendre en photo, ce qu’il semble approuver en remuant vaguement les doigts! Un pianiste passionné et son piano à queue assurent le spectacle, des deux côtés de l’allée où il s’est installé, des spectateurs ont pris place sur les bancs; aujourd’hui encore je me demande comment il s’y prend pour déménager son instrument… Un groupe avec un trompettiste qui déchire, me confirme que nous sommes dans un haut lieu de la culture-hétéroclite où, rencontrer les locaux est facile!
Greenwich Village est aussi à voir, les immeubles de briques rouges ont des marches qui mènent à l’entrée, bien abritées sous le feuillage dense que donne l’été aux arbres, on se croirait vraiment dans You’ve got mail. Dans les rues plus commerçantes, la bonne ambiance est palpable! Un groupe de jazz a pris d’assaut un trottoir, et a réussi à réunir une petite foule d’admirateurs: faut dire qu’ils sont particulièrement doués, voire spectaculaires, nous leur achetons même des CD! En levant les yeux, nous apercevons les escaliers de secours omniprésents dans la Grande Pomme et quelques réservoirs à l’ancienne, je m’imagine bien vivant dans le Village, précurseur et convivial! Une case que je peux cocher sur la liste…
Nous sommes tellement crevées que nous rampons presque le soir, souvent nous ne rentrons qu’après le dîner… ou le pub! Un soir pourtant nous sommes particulièrement survoltées, nous allons voir une comédie musicale sur Broadway… Les affiches sont prometteuses, Wicked, Evita, Ghost, Chicago… Il y a aussi Mike Tyson qui donne son premier stand-up comedy, la liste est longue, mais notre choix s’arrête sur Raven Symoné dans Sister Act… C’est un truc de dingue! Une Deloris van Cartier très crédible, mais surtout hilarante! Fous rires et chansons entraînantes de quoi nous faire tourner la tête!!!
Ceci dit le spectacle que nous préférons est de loin celui que nous trouvons un peu plus au nord à Manhattan… Un peu longues à la détente le matin, nous pensons être trop à la bourre pour ce que nous avons prévu… Mais bon, nous y allons quand même. Au passage, nous esquivons un mec qui essaie de vendre des T-shirts à ma frangine sur le ton de Joey Tribiani qui demande des nouvelles à une femme : « Lady, I’ve got T-shirts you’d like » ; puis nous apercevons de loin l’Apollo Theater qui a accueilli des pontes de la musique depuis son ouverture au début du siècle dernier; remontons la rue selon les indications très vagues d’un guide de voyage que nous ne suivons pas vraiment, et enfin nous traversons un parc où des jeunes hommes se musclent et jouent du basket… Cherchons et cherchons encore, mais ne trouvons pas… Jusqu’au moment où des voix se font entendre… Nous sommes à Harlem, et nous avons trouvé une messe à la Bethel Gospel Assembly pile ce que voulait ‘mon sèr’ ! Maintenant je sais ce que sont les voies (voix) du Seigneur! Inutile d’espérer y faire un tour et repartir ni vues ni connues après avoir pris quelques clichés… Non non non, pas ici! Nous sommes accueillies à la porte et l’homme nous indique des places assises bien au centre de la salle. L’officiant sait que la moitié de l’assemblée est étrangère, il les a apparemment lui-même souhaité la bienvenue avant que nous n’arrivions et recommence depuis l’autel, il liste ceux présents: « Des Italiens, des Français, des Mexicains, qui encore ? » demande-t-il… Nous entendons hurler « Malaisie, Floride », et encouragée par ma voisine de banc, aussi appellée sœur, je crie « Mauritius »…
– What?
– Mauritius!
– Where is that?
– Indian Ocean!
– Welcome then…
Sur ce, il invite l’assemblée à offrir une chanson de bienvenue aux visiteurs, la chorale gospel donne le ton, la chanson est reprise en chœur. Au milieu du chant quelques uns se lèvent, rejoints au fur et à mesure par d’autres, un hymne qui vient du cœur, les habitués les plus proches se tournent vers nous et chantent en nous regardant droit dans les yeux, qui ne tardent pas à se remplir de larmes… Jamais de ma vie je n’ai ressenti une telle bienveillance, moi qui suis friande de bains de foules, de liesse populaire, de stades, concerts et festivals, en terme d’émotions, je suis servie! Tu peux me passer un mouchoir? Ma sœur est dans le même état que moi, nous n’avons plus du tout ni l’envie, ni l’intention de nous éclipser! Le reste de la cérémonie ressemble beaucoup à ce que je connais de l’Eglise locale, les belles chansons et l’approbation systématiquement sonore des fidèles en moins! Nous avons adoré! Il me tarde d’y retourner…
On mange bien à New York, les portions sont énormes et les prix corrects… Quelques bonnes adresses:
Les hot dogs (évidemment!) se vendent à tous les coins de rues…
Testez la cuisine cubaine chez Victor’s Café sur Broadway
Et allez chez Bubba Gump sur Time Square et lâchez-vous sur leurs cocktails,
Les Buffalo wings chez Lucy’s Cantina Royale (nous étions en ‘roof terrasse’, génial l’été) sont grandioses et ses cocktails sont immenses aussi…
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